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Hitler et le Vatican…

21 février 2010

hitler-pio-xii

Un nouvel ouvrage, fort intéressant, vient apporter une lumière précise sur les liens réels qui furent ceux de l’Allemagne nazie et le Vatican, loin des clichés et des fantasmes, bien que se distinguant par une perception non négative des forces catholiques nationalistes actives au sein du IIIe Reich, et de l’importance de leur rôle afin de défendre la place de l’Eglise à l’intérieur du régime.

En effet, le livre de Peter Godman qui vient d’être publié (Hitler et le Vatican, Perrin, 2010), analyse la politique du Vatican à l’égard du national-socialisme, sous Pie XI. Ceux qui attendent tout des archives du Vatican ne seront pas déçus par le livre de Peter Godman, Hitler et le Vatican. Cet historien a en effet profité de l’ouverture des archives du pontificat de Pie XI pour écrire son livre. D’emblée, il attaque les polémistes, Goldhagen et autres Cornwell, plus attachés à dénoncer qu’à analyser, à attaquer qu’à expliquer, ainsi que leurs conclusions grotesques. Le décor est planté. Nous allons lire un livre d’historien. Et c’est le cas.

D’une lecture aisée, l’ouvrage reste fidèle aux méthodes de l’analyse historique, par un travail à partir des sources archivistiques référenciées. Il constitue une réflexion argumentée sur les débats qui ont agité le Saint-Siège, pendant les années Trente, à propos de la meilleure position à avoir face à l’Allemagne hitlérienne. Il en ressort une image particulière de la structure vaticane, très divisée entre ses différents services, mais dans laquelle le pape, quoi que semble en penser P. Godman, reste le décideur principal.

La thèse de Godman est la suivante : Pie XI, secondé par Mgr Pacelli, a opté pour une confrontation réduite et une condamnation atténuée du national-socialisme, dans le cadre précis et rigoureux du concordat de 1933 ; stratégie réduite par Godman à un « silence », préfigurateur de celui de Pie XII.

Les adversaires de Pie XII ne trouveront, dans cette étude, aucune pièce, aucune analyse qui conforterait l’absurdité de leurs thèses. Bien au contraire, elle est une remise en cause – archives à l’appui – de la thèse du pape d’Hitler qui colle à Pie XII. « Prophète d’un ordre mondial centré sur Rome », il apparaît comme un fin connaisseur du nazisme. Très intéressante est la catégorie dans laquelle P. Godman place Pacelli, celle des opportunistes, mais au sens noble du terme. Autrement dit, il le décrit comme un réaliste qui pèse chacune de ses décisions et entend agir au bon moment.

Deux autres personnages, absolument incontournables mais pourtant méconnus, apparaissent en pleine lumière : Mgr Orsenigo et Mgr Hudal. Le premier est le successeur de Pacelli à la tête de la nonciature de Berlin. Hostile à toute rupture et au moindre éclat,  le nonce recherche constamment des compromis et des terrains d’entente, persuadé qu’il fut que le régime d’Hitler pouvait représenter une atlternative et une résistance face à la montée du bolchévisme.

Le second, Mgr Hudal, est le recteur de l’église Santa Maria dell’Anima à Rome. Cet Allemand, nationaliste convaincu, occupe une place centrale dans le livre.  Désireux de jouer un rôle à la mesure de ses capacités, il développe toute une théorie afin de rapprocher le Vatican du III° Reich. Selon lui, seule une partie du national-socialisme, la plus à gauche, est hostile à l’Eglise et au christianisme. Il faut donc s’appuyer sur l’aile conservatrice afin de maintenir Hitler dans des dispositions que Mgr Hudal et d’autres au Vatican croient bonnes. Il considère que Mein Kampf développe une conception politique compatible avec le catholicisme, et voit une convergence possible entre le christianisme et le nazisme, notamment autour de la question sociale. Ainsi espère-t-il constituer une alliance contre le communisme et même amener les nazis à se « christianiser » de plus en plus. Le fondement idéologique et théologique de cette thèse et les efforts déployés par Mgr Hudal, sont décrits avec minutie par P. Godman.

Pour P. Godman, Pie XI et Pacelli sont engagés dans la défense du concordat de 1933. Leur volonté de le sauver, contre vents et marées, explique leur recul et le choix de l’encyclique. La thèse est convaincante et sans aucun doute conforme à leur pensée, mais cela ne justifie pas la posture quelque peu morale adoptée par l’auteur. Surtout, il semble oublier une évidence du monde des décideurs : ils n’ont pas le choix entre une bonne et une mauvaise solution, mais entre plusieurs mauvaises. Charge à eux de prendre la moins mauvaise. C’est ce qu’a fait Pie XI.

P. Godman ne s’arrête pas sur les conséquences qu’aurait eu le choix du Syllabus. C’est normal. Personne ne les connaît. Ce qui est certain, c’est que Pie XI et Pacelli considèrent que le concordat signé avec les nazis, reste le meilleur moyen de protéger les catholiques allemands. Car c’est bien là le cœur du problème. Les évêques allemands n’ont peut-être pas l’étoffe de héros comme Godman l’écrit (p.247) mais ils ont entre leurs mains la vie de leurs fidèles. Il aurait fallu le préciser.

Ce livre confirme plusieurs points : le pragmatisme de  l’Eglise à l’égard du nazisme, la convergence entre Pie XI et son principal collaborateur, les divisions du Vatican sur la stratégie à adopter, mais néanmoins  sincèrement convaincu de la nécessité d’établir et renforcer son alliance avec l’Allemagne, ne l’oublions-pas profondément chrétienne dans ses racines, qui avait fait de la lutte contre le communisme un objectif premier de sa politique, ce qui ne pouvait que répondre aux souhaits de Rome.

Source

16 commentaires leave one →
  1. Valence permalink
    21 février 2010 11:45

    Voilà un éclairage qui ne manque pas d’intérêt. Les historiens et donneurs de leçons actuels, oublient un peu rapidement en effet que le bochévisme menaçait toute l’Europe, et que l’Eglise avait évalué à sa juste mesure le danger. Et face à Staline les démocraties ne pesaient pas lourd…

  2. apostolatus specula permalink
    21 février 2010 12:02

    Après la guerre, Pie XII interrogé sur ce qui venait de se passer et les raisons qui présidèrent à cet effroyable tragédie pour l’Europe, avec sagesse déclara : « Dieu tout-puissant a Ses raisons. C’est Lui qui a souhaité ce qui est arrivé. »

  3. morpri permalink
    21 février 2010 12:10

    A la mort d’Hitler, le 3 mai1945, le genéral Franco fit publier ceci dans la presse en Espagne :

    « Adolf Hitler,fils de l’église catholique est mort en défendant la chrétienté. On comprendra donc que notre plume ne trouve pas de mots pour pleurer sa mort alors qu’elle en avait trouver tant pour exalter sa vie.
    Sur ces restes mortels se dresse sa figure morale victorieuse, avec la palme du martyre, Dieu remetra a Hitler les lauriers de la victoire ».

  4. cax permalink
    21 février 2010 12:20

    Mgr Hudal cité dans la note, a fait partie de ceux qui ont aidé des milliers de nazis à s’échapper ou à se cacher à l’issue de la guerre, avec pour certains d’entre eux l’émigration vers l’Amérique du Sud organisée par le Vatican lui même.

  5. DST permalink
    21 février 2010 12:30

    Mgr Hudal, recteur depuis 1923 de Santa Maria dell’Anima (Église nationale de l’Autriche et de l’Allemagne, un des fiefs du pangermanisme à Rome), est aujourd’hui connu comme l’un des principaux responsables vaticans de l’«exfiltration» des nazis depuis 1944.

    Hudal était le protégé d’Innitzer, cardinal-archevêque de Vienne, ce dernier né en 1875 à Weipert, en «Bohême allemande», fit l’essentiel de sa carrière à Vienne, après des études à Santa Maria dell’Anima, «collège teutonique» dont Pacelli devint le «protecteur» le 31 mars 1930, après la mort de Merry del Val (son titulaire depuis le 8 novembre 1907). Innitzer fut nommé à l’université dès 1911, et il gravit tous les degrés de sa hiérarchie, jusqu’aux postes de doyen puis de recteur, en 1928-1929 – il fut en novembre 1932 nommé archevêque de Vienne.

    Protecteur de Hudal, de dix ans son cadet, Innitzer trouva en lui un porte-parole dans le projet d’un futur concordat autrichien. Il fut en 1930 nommé conseiller au Saint-Office, sanctuaire de la doctrine: c’est à ce titre qu’il multiplia les « tournées de conférences » en Italie et en Allemagne, prêchant à «d’énormes foules de catholiques germanophones» la formule du 30 janvier 1933. Il exprimait régulièrement sa ferveur, ainsi en mai 1933, où il déclara «devant un parterre» de diplomates et dignitaires nazis réunis à l’Anima «qu’en cette heure marquée au sceau du destin, tous les catholiques allemands vivant à l’étranger saluent l’avènement du nouveau Reich, dont la philosophie s’accorde tant aux valeurs nationales qu’aux valeurs chrétiennes». Il reçut en juin 1933 une récompense «plutôt rare» pour un recteur de collège, le titre «d’évêque titulaire d’Ela», consacré par une messe célébrée à l’Anima par le futur Pie XII.

    Hudal, après avoir été associé au concordat autrichien, et sans doute à l’allemand, renforça son intimité avec von Papen, dont il fut le conseiller.

    Après le Te Deum saluant à l’Anima le plébiscite sarrois, on le remarqua souvent en 1935, il édita à Innsbruck et fit publier sous forme d’«étude» par la Bayerische Volkszeitung l’ouvrage «Rome, le christianisme et le peuple allemand» (Rom, Christentum und deutsches Volk) prônant une alliance intime entre «germanisme» et «christianisme».

  6. DST permalink
    21 février 2010 12:36

    Mgr Hudal affirmait dans son livre :

    « la lutte contre le bolchevisme et les juifs est vitale », il voyait dans les lois de Nuremberg : «une mesure nécessaire d’auto-défense contre l’invasion d’éléments étrangers».

    Il rajoutait :  » le droit canon avait exclu les juifs jusqu’à ce que les murs du ghetto eussent été abattus au XIXè siècle par l’État libéral d’abord et non par l’Église ;les principes de l’État moderne fondés sur la règle de l’égalité de traitement devant la loi ont été créés par la Révolution française et ne sont pas ce qu’il y a de mieux du point de vue du christianisme et de la nationalité».

    Son livre fut massivement diffusé en Autriche, et Hudal reçut l’insigne d’or réservée au membre du parti.

  7. 21 février 2010 22:36

    +

    Laudetur Iesus Christus ! Semper laudetur !

    … vous avez écrit:

    « Le fondement idéologique et théologique de cette thèse et les efforts déployés par Mgr Hudal, sont décrits avec minutie par P. Godman. »

    … QUESTION: Savez-vous où l’on peux se procurer cet écirt , même en langue allemande? MERCI pour vos informations.

    Viva Cristo Rey ! Viva !

    RZL – Radio Zone Libre

    http://www.rzl.fr.fm

    +

    • sixte permalink
      22 février 2010 10:08

      Voici où vous pourrez vouqs procurer cet ouvrage passionnant, le plus complet sur le sujet et de très loin, puisque l’auteur a pu accéder directement aux archives. En effet, Peter Godman est l’un des plus grands spécialistes de l’histoire du Vatican, enseignant à l’université de Tübingen, l’Eglise l’a nommé membre du Comité des archives du Saint-Siège, ce qui lui a permis d’être l’un des premiers universitaires à se pencher sur les documents confidentiels traitant de cette période et jusqu’alors détenus par le département en charge de la foi et de la moralité catholiques. Il enseigne désormais à l’université de Rome.

      http://www.bibliosurf.com/Hitler-et-le-Vatican

  8. 22 février 2010 01:07

    Eh oui, c’est clair et si la mayonnaise avait pris, Dieu sait à quoi ressemblerait l’Europe aujourd’hui.

  9. -O- permalink
    7 mars 2010 01:31

    Complément de lecture:

    Nicole, Jean-Thomas. LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DU SAINT-SIÈGE FACE À L’ALLEMAGNE NATIONALE-SOCIALISTE : RAPPORT D’UNE PASSION AMBIVALENTE (1933-1938)

    Cliquer pour accéder à 25511.pdf

  10. jugurta permalink
    11 mars 2010 02:57

    hitler et le vatican , je dirais que le partis nazie avait besoin des chrétiens de par l’europe , mais en gardant au centre l’intret majeur de l’expansion ! un pape actuellement ressemeble a une speakrine qu’a un protecteur des moeurs et ethiques du vieux continent, sinon dans labscence de hitler , et des papes , lantisemitisme vous ravage comme taxe !

  11. Francine permalink
    17 août 2010 14:14

    Pour rappel :
    …. »Lorsque après la mort du Pape Pie XII, Hochhuth mit en scène sa triste caricature, on dit que Mgr Hudal lui en aurait fourni le matériel adéquat. J’ignore si c’est vrai. Mais au départ de ce bruit il y a sans doute le fait que Hudal ne put jamais supporter que le Saint Père lui ait fait comprendre d’avoir à se démettre de son poste de recteur de l’Anima. Naturellement, Pie XII ne fit pas cela seulement de son propre mouvement, mais il y fut contraint par les plaintes constantes qu’il reçut de la part de cardinaux, d’évêques, et de prêtres et qu’il lui fallut, après une enquête minutieuse, considérer comme justifiées. Mgr Hudal ne put jamais surmonter cela. »

    Livre de Mère Pascalina LEHNERT – « Pie XII mon privilège fut de le servir » – page 146

  12. Koopa Troopa permalink
    18 août 2010 12:13

    On aurait besoin de Hudal, de Coughlin, de Mayol de Lupé…

  13. Francine permalink
    19 août 2010 19:44

    Il faut rappeler également que le Cardinal Pacelli
    – futur Pie XII – imposa le silence au père Coughlin !

  14. Koopa Troopa permalink
    3 avril 2011 19:39

    Sur ordre des Juifs et avec la récompense que l’on sait…

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